L’évaluation du risque pour les espèces protégées ne peut être renvoyée à plus tard

Par une déci­sion ren­due le 30 mai dernier, le Con­seil d’État a cen­suré une Cour qui n’avait pas recher­ché si le risque que présen­tait un pro­jet éolien pour des espèces pro­tégées pou­vait ou non être regardé comme étant suff­isam­ment car­ac­térisé « dès l’origine », notam­ment au vu des effets atten­dus sur la mor­tal­ité de cer­taines espèces (CE, 30 mai 2024, n° 474077).

Dans cette affaire, une asso­ci­a­tion de pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement et des par­ti­c­uliers avaient demandé à la Cour admin­is­tra­tive d’ap­pel de Bor­deaux d’an­nuler l’au­tori­sa­tion envi­ron­nemen­tale d’un parc éolien, au motif notam­ment qu’une déro­ga­tion “espèces pro­tégées” serait req­uise.

La Cour avait rejeté leur requête en rel­e­vant notam­ment qu’une telle déro­ga­tion n’était pas néces­saire et avait con­sid­éré, con­cer­nant l’av­i­faune, que :

  • le pro­jet litigieux ne créait pas de « risque par­ti­c­uli­er », tout en pré­cisant que les « impacts résidu­els atten­dus » lors de la con­struc­tion étaient « faibles et tem­po­raires » ;
  • les effets du pro­jet sur la mor­tal­ité de cer­taines de ces espèces seraient éval­ués au début de la mise en fonc­tion­nement.

La Cour avait égale­ment relevé, con­cer­nant les chi­rop­tères, que des « suiv­is per­me­t­tant d’estimer leur mor­tal­ité » étaient prévus et que des « mesures cor­rec­tives » pour­raient être ultérieure­ment pro­posées en cas de « con­stat d’un impact sig­ni­fi­catif ».

Les requérants se sont pourvus en cas­sa­tion devant le Con­seil d’État, qui cen­suré l’ar­rêt de la Cour qui n’avait pas recher­ché « si le risque pour ces espèces pou­vait ou non être regardé comme étant suff­isam­ment car­ac­térisé dès l’origine, notam­ment au vu des effets atten­dus sur la mor­tal­ité de cer­taines espèces ».

En d’autres ter­mes, le risque que com­porte le pro­jet sur les espèces pro­tégées ne peut être cor­recte­ment iden­ti­fié qu’à con­di­tion de con­naître l’ensem­ble des effets du pro­jet sur les espèces au moment de l’ob­ten­tion de l’au­tori­sa­tion ain­si que l’ef­fi­cac­ité des mesures d’évite­ment et de réduc­tion.

Cette solu­tion peut être rap­prochée d’une déci­sion con­cer­nant le con­trôle de l’ef­fec­tiv­ité des mesures d’évite­ment et de réduc­tion au titre de la police des instal­la­tions classées pour la pro­tec­tion de l’en­vi­ron­nement (ICPE) (CE, 11 août 2023, n° 459062). Dans cette affaire, où l’ab­sence de déro­ga­tion n’é­tait pas dis­cutée, le Con­seil d’État avait con­sid­éré qu’en ren­voy­ant à plus tard la déter­mi­na­tion des mesures d’évite­ment et de réduc­tion au regard des résul­tats d’une cam­pagne d’é­tude et sur­veil­lance à venir, ces mesures n’é­taient pas encore arrêtées de sorte qu’elles n’of­fraient aucune garantie d’ef­fec­tiv­ité.

Quelles recom­man­da­tions pra­tiques ? Les por­teurs de pro­jet doivent s’as­sur­er que leurs études nat­u­ral­istes éval­u­ent cor­recte­ment l’ensem­ble des effets du pro­jet sur les espèces pro­tégées ain­si que l’ef­fi­cac­ité des mesures d’évite­ment et de réduc­tion. Ni l’é­tude d’im­pact, ni l’au­tori­sa­tion envi­ron­nemen­tale ne doivent ren­voy­er à plus tard la déter­mi­na­tion du risque pour les espèces pro­tégées.

Chez Glaz Avo­cats, nous accom­pa­gnons nos clients dans la sécuri­sa­tion de leurs pro­jets EnR, notam­ment en audi­tant les études d’im­pacts avant dépôt.


Crédits pho­tographiques : Stephan Sprinz


D'autres articles sur les mêmes thèmes :