Pas d’exemption d’autorisation de défrichement en l’absence de discontinuité significative avec la parcelle boisée voisine
Par une décision d’espèce rendue le 26 juin dernier, le Conseil d’Etat s’est prononcé en faveur du maintien de la continuité forestière au sein des bois et forêts des particuliers en considérant qu’un terrain boisé sur lequel est projeté un défrichement ne peut pas être exempté d’autorisation de défrichement lorsqu’il ne présente pas de discontinuité significative avec le secteur boisé voisin (Conseil d’État, 5ème chambre, 26 juin 2023, 461946).
Dans cette affaire, le maire de Prades-le-Lez a délivré à un promoteur immobilier un permis d’aménager pour la réalisation d’un lotissement sur un terrain d’assiette de 9482 m² jouxtant un terrain boisé d’une superficie de 28,3 hectares.
Une association et plusieurs requérants personnes physiques ont demandé l’annulation de ce permis au motif que le terrain d’assiette du projet comporte un secteur boisé et aurait dû faire l’objet d’une autorisation de défrichement.
Pour mémoire, le code forestier soumet, par principe, tout défrichement réalisé dans les bois et forêts des particuliers à un régime d’autorisation préalable (articles L. 341–1 et s. du code forestier). Une telle autorisation doit d’ailleurs être obtenue préalablement au permis d’aménager (L. 425–6 du code de l’urbanisme).
Des exemptions sont toutefois prévues par le code forestier, notamment lorsque les défrichements liés à une construction soumise à autorisation d’urbanisme sont projetés :
- dans les bois et forêts d’une superficie inférieure à un seuil variable selon les départements compris entre 0,5 et 4 hectares, sauf s’ils font partie d’un autre bois dont la superficie, ajoutée à la leur, atteint ou dépasse ce seuil (L. 342–1, 1° code forestier) ;
En l’espèce, ce seuil a été fixé à 4 hectares dans le département de l’Hérault (arrêté du 11 mai 2004).
- Dans les parcs ou jardins clos et attenants à une habitation principale, lorsque l’étendue close est inférieure au seuil susvisé, soit en l’espèce 4 hectares (L. 342–1, 2° code forestier).
Pour rejeter la requête en première instance, le Tribunal administratif de Montpellier a retenu que le défrichement envisagé correspondait aux cas de figures susvisés et devait donc être exempté d’autorisation de défrichement dans la mesure où la parcelle d’assiette du projet d’une superficie de 9482 m² (soit 0,9482 hectares) (i) n’appartenait pas à un massif boisé de plus de quatre hectares et (ii) constituait un parc attenant à une habitation principale.
Or ce jugement ne prenait pas en compte l’existence d’un secteur boisé d’une superficie de 28,3 hectares situé dans la continuité du terrain d’assiette du projet.
Partant, le Conseil d’Etat a constaté que la parcelle formant le terrain d’assiette du projet comportant un secteur boisé ne présentait pas de discontinuité significative avec le secteur boisé de la parcelle voisine d’une superficie de 28,3 hectares.
Il retient notamment que (i) la présence d’une étroite voie de desserte entre ces secteurs boisés et (ii) la circonstance que certaines parcelles boisées jouxtant la parcelle en cause au sud et à l’ouest sont bâties ne sont pas de nature à créer une telle discontinuité.
En l’absence de discontinuité significative, le Conseil d’Etat considère donc que le secteur boisé concerné par le défrichement fait donc partie du bois voisin dont la superficie, ajoutée à la sienne, dépasse le seuil de 4 hectares. Le projet n’est dès lors plus concerné par les exemptions visées ci-avant et une autorisation de défrichement est donc nécessaire.
Le Conseil d’Etat juge également que le tribunal administratif de Montpellier aurait également dû rechercher si le terrain d’assiette du projet constituait un parc clos.
En définitive, le Conseil d’Etat annule le jugement du tribunal administratif de Montpellier.